Dans un dictionnaire, il est écrit que
«l'amour est un mouvement,
une affection, de la tendresse».
Je m'efforce de comprendre comment ça peut
disparaître
et je tourne en boucle dans ma tête
la certitude que
si ça se perd,
ça se retrouve
un coeur ce n'est pas une lumière
avec un interrupteur.
Il doit bien rester quelque chose
par terre.
Si je cherche assez fort, je finirai bien
par le voir, le reste d'amour à faire pousser
dans un bocal avant de le restituer.
Il faudra attendre une bonne grosseur, la bonne couleur,
ce sera «mon précieux».
Ce sera leur surprise.
Jardinier de parents heureux.
Je rampe sur le sol et pose des pièges,
élabore des plans à même le plancher,
ma mère crie que je fais lever la poussière.
Je lui réponds que l'air vide de notre appartement a besoin
de cette décoration,
qu'à défaut de nous avoir,
je m'entoure des particules de nos peaux mortes,
des restes de déjeuner et de nos jeux dehors,
avant que le vent ou le ménage emporte vraiment tout.
Elle a ouvert la douche pour pleurer tranquille,
elle fait toujours ça en pensant que je ne le sais pas.
Pendant ce temps-là, je me sens un peu mal,
mais me semble que j'ai droit
d'avoir de la peine,
des larmes,
une colère bien à moi.
Aujourd'hui, je ne ferai pas le ménage de ma chambre.
Ce poème nous aide à assumer nos avalanches émotionnelles.
- Quelle est votre définition de l’amour ?
- De quoi parle le poème ?
- Pouvez-vous expliquer ce vers : « un cœur n’est pas une lumière avec un interrupteur. »
- Qu’est-ce qu’une métaphore filée ? Est-ce que ce poème en contient ?
- Envisagez la récitation de ce poème comme une analyse de l’amour selon différentes perspectives. Celle du dictionnaire, celle de la locutrice, celle de sa mère, etc. En identifiant la chronologie du poème, il vous sera plus simple de le mémoriser.
Véronique Grenier, «4.» Colle-moi, la courte échelle, 2020, p. 19-21.